A l’occasion du centenaire du premier président de la République algérienne indépendante, Ahmed Ben Bella, un colloque a été organisé, les 4 et 5 décembre, à l’université de Tlemcen, en hommage à ce grand militant tiers-mondiste. A cette occasion, plusieurs personnalités connues pour leur engagement en faveur des peuples du sud et particulièrement des peuples africains ont tenu à rendre hommage à la mémoire du grand révolutionnaire algérien. L’ancienne ministre malienne de la culture et écrivaine engagée, Aminata Dramane Traoré : « J’ai le souvenir d’un père spirituel et je suis forte de cette relation que j’ai eue avec Ahmed Ben Bella qui m’a donné le sentiment que mon combat est nécessaire dans ce monde injuste et violent …A Bamako, lors du forum mondial sur l’Afrique, Ahmed Ben Bella a su démontrer que notre combat en Afrique (était) d’actualité et que le colonialisme n’était pas encore fini. Nous assistons, aujourd’hui, à la droitisation du monde et l’Afrique a de quoi s’inquiéter », a souligné Mme Traoré. Elle a dit s’estimer « l’héritière » du combat d’Ahmed Ben Bella pour un monde juste. « Je suis heureuse et fière de tenir le flambeau de la décolonisation, et je porte en moi une part de cette force qui le caractérisait », a-t-elle dit. Tout en s’excusant de son absence au colloque, Jean Ziegler a tenu à dire dans un message lu par la présidente du colloque : »merci à Ahmed Ben Bella » et que la « révolution algérienne est sans doute l’événement le plus important de la deuxième moitié du 20ème siècle ».
En hommage à la mémoire de Ahmed Ben Bella, nous reproduisons sa contribution rendue publique le 1er novembre 1982, quelues semaines après les massacres odieux des camps de réfugiés palestiniens au Liban, Sabra et Chatila. Dans cette contribution, Ahmed Ben Bella a tenté de tirer les enseignements des luttes de libération nationale de la période précédente pour exposer quelques repères en vue de continuer et de corriger cette longue lutte. C’est une contribution qui mérite d’être lue et discutée à un moment où nous nous posons des questions sur les voies et moyens que devrait prendre la lutte d’émancipation dans les conditions nouvelles imposées par le redéploiement du système impérial à l’échelle planétaire.
Quel fil invisible relie-il le 1er novembre 1954, celui des sentiers de crête et des chemins de lumière, 1er Novembre de l’honneur et du courage avec ce 1er Novembre 1982, de l’occupation du Liban, de l’encerclement et du bombardement de Beyrouth Ouest, celui de Sabra et Chatila, du déshonneur et de la trahison des régimes arabes et musulmans, de l’abandon des palestiniens et des hommes libres du Liban ?
En cet instant solennel, il nous faut répondre à cette grave question.
Sous le choc répété des coups de bélier des luttes armées de libération, le système mondial céda tout d’abord, mais petit à petit, il se ressaisit pour colmater les brèches faites dans sa citadelle assiégée. Alors de nouvelles formes de subordination plus subtiles mais tout aussi réelles virent le jour. Avec un territoire récupéré mais réduit et limité par des bornes qui symbolisent notre nanisme politique, économique et culturel ; avec un hymne et un drapeau vidés de leur contenu puisque vecteurs de la division de ceux qui hier encore étaient frères, nous continuons ainsi à téter goulument à la mamelle de celui qui fut notre colonisateur.
Le développement devient le mal-développement. Les agricultures furent sacrifiées. L’industrialisation nous lia solidement au char de l’hémisphère Nord, et subordonnés à sa domination grâce à plus que les dégâts matériels, ce sont ceux produits dans l’homme qui sont l’es plus graves. Dans un tel système, même ce qui paraissait être une bénédiction de Dieu , même nous atouts que nous pensions les plus sûrs tels le pétrole ou le gaz, se sont avérés être une malédiction. Ces matières, polluantes en elles-mêmes, ont aussi pollué nos âmes, nos consciences. L’action des appareils, des Etats, des systèmes politiques et des polices ainsi que la corruption généralisée produisirent le reste.
C’est là un long chemin de Golgotha que l’homme Arabe, l’homme musulman doit parcourir en sens inverse, alors que le désert avance, envahissant ses horizons. Dès lors, les hordes barbares pouvaient s’ébranler impunément en direction de Saïda, Sour, Damour, Beyrouth, Sabra, Chatila. C’est parce que les hommes arabes et musulmans, hormis quelques rares exceptions, étaient normalisés par leurs systèmes et leurs gouvernements, c’est parce qu’ils étaient réduits à leur plus simple expression, parce que l’on avait tué en eux ce qui faisait leur qualité d’homme au plein sens du terme, que le monde assista hébété à ce spectacle insoutenable d’une capitale arabe qui comptait plus d’un million d’habitants encerclée 120.000 centurions triomphants piétinant sous leurs bottes ensanglantées la dignité d’un pays de 3 millions d’habitants et d’un monde musulman qui en compte quelque 900 millions.
Durant plus de trois mois et jusqu’à ce jour, un cirque d’infamie dressa son chapiteau pour nous fournir par médias interposés notre ration quotidienne de honte et d’indignité. Images après images, toutes plus atroces les unes que les autres et qui nous hantent à jamais, pour jamais nous quitter. A travers ces bébés, ces enfants, ces vieillards, ces femmes et même ces chevaux martyrs, à travers ces corps mutilés et broyés, par-delà les yeux fous de mères rescapées et se demandant ce qu’elles font là encore en vie, une photo serrée contre leur cœur, c’est notre conscience qui est interpellée : que faisons-nous de la nôtre ? Pourquoi et de quel droit vivons-nous encore. Cette terrible question nous poursuivra sans fin. Jusqu’au jour où nous déciderons de parcourir en sens inverse le chemin de l’infamie qui nous conduisit là, mais nous n’avons plus le droit de nous égarer en route. Ce chemin n’est pas une voie royale, et faute de le baliser sérieusement nous risquerions de nous retrouver dans un cul de sac.
Ces balises, ce sont les convictions qui ne doivent plus nous quitter, les clignotants qui ne doivent plus s’éteindre sur le tableau de bord de notre navire en dérive ; ce sont les ultimes lueurs qui nous sauveront du naufrage.
En voici quelques-unes.
1) L’ennemi est tapi au fond de nous-même, prêt à bondir à nouveau. Il nous faut le traquer de toutes parts. Dans nos consciences, dans nos schémas mentaux, dans nos systèmes politiques autant de secrétions étrangères. C’est à régler ces problèmes qu’il convient de s’atteler sans plus tarder. Cette tâche commande tout le reste. Elle seule facilitera l’avènement d’un homme nouveau, d’équipes dirigeantes nouvelles. Il nous faut reconstruire pierre après pierre notre citadelle intérieure. Cela devra nous conduire à de profonds et radicaux changements politiques. Plus jamais nous ne devrons nous taire devant les abandons répétés qui ont conduit à l’ignominie de s’affubler de l’habit de la vertu. Plus jamais les désastres de Beyrouth de se parer du v de la victoire comme à Fès et cela à la veille même des massacres de Sabra et Chatila.
2) Toutes les idéologies occidentales, tous les systèmes politiques ont fait naufrage. Nous les avons définitivement enterrés à Beyrouth, à Sabra et à Chatila. Nous avons pèle- mêle jeté ces outils vétustes dans une fosse commune. Aux côtés de nos systèmes politiques, de nos organisations politiques et de leurs projets devenus sans objet, sans vie, ils gisent là, tout au fond, pour toujours.
3) La construction des Etats, des systèmes et finalement celle des hommes passe par une remise en ordre des fondements de notre moi, de notre personnalité, de nos constituants culturels. D’où l’exigence d’une démarche débarrassée des catégories véhiculées par le paradigme occidental, mais au contraire articulée selon nos propres structures mentales qui forgeant leurs propres concepts ainsi d’ailleurs que leurs propre sémantique permettront de dégager le profil d’un nouveau projet de civilisation, d’un nouveau sens à notre vie. Cette démarche permettra d’ailleurs à d’autres que nous de mieux définir le leur.
4) Une telle opération ne saurait être réalisée en vase clos, en laboratoire, pas plus qu’elle ne saurait devenir un ésotérique jeu d’église. Elle devra se dérouler à l’air libre, dans l’action de chaque jour, s’en nourrir et en dégager les correctifs nécessaires. Ce ne sont pas des cénacles réunis à Al Azhar, Al Zitouna ou Al Karaouiyine qui favoriseront cette opération, la raison d’Etat les ayant pervertis, mais des forums permanents où la création, l’invention deviendront possibles parce que l’invention, la création seront devenues libres.
5) Par les implications des luttes qui s’y déroulent ou vont s’y dérouler, la Palestine ainsi que le Liban situent l’un des lieux essentiels où va se jouer notre avenir… C’est que nous sommes confrontés à quelques défis majeurs, lancés par le système mondial. Ces défis peuvent se résumer en un nom ISRAEL.
Nonobstant ses motivations proclamées, Israël est devenu, n’est autre que l’aboutissement tragique de la dérive d’une civilisation. L’aboutissement des perversions du capitalisme, de l’exploitation qu’il véhicule, de sa logique, de ses fantasmes, de son mépris de peuples et de races qui jusqu’à nos jours en gardent d’affreux stigmates ; l’aboutissement du grand renfermement et de ses précipités : le stalag et le goulag. Aboutissement qui par un étrange retournement des choses mais dont l’histoire atteste la permanence, conduit Israël par la voix de ses dirigeants à se proclamer le protecteur des valeurs occidentales dans la région.
Ne voit-il pas qu’il reconduit à son tour cela même dont les juifs ont eu à souffrir en Europe ? Israël est d’abord et avant tout un fait culturel occidental qui vise à réduire son environnement culturel, social, économique et politique. Sans constitution, sans frontières définitives puisqu’elles se trouvent là où se trouve un soldat israélien selon Ben Gourion ; n’envisageant de sécurité effective que par « la division des arabes et la constitution dans la région d’Etats confessionnels » selon les dires de Golda Meier ; ne voyant d’avenir que si ses intérêts ne se limitent pas aux pays arabes du Moyen orient, de la Méditerranée, de la mer rouge » mais pour des raisons de sécurité dans les
Année 80, ils devraient s’étendre à des pays comme la Turquie, l’Iran, le Pakistan, des régions comme le Golfe arabo-persique et l’Afrique, notamment les pays d’Afrique du nord et d’Afrique centrale ainsi que le proclame Sharon.
Avec la confiscation du Néguev en 1948, de la Cisjordanie et Gaza en 1967, du Golan en 1982, du Litani maintenant et avec des cercles concentriques pouvant atteindre la Turquie, l’Iran, le Pakistan ou l’Afrique du nord, Israël apparait telle une entité en devenir constant, un cancer dont l’ombre envahit tout notre région.
Cet Israël-là, nous ne l’accepterons jamais. Sa présence est un décret de mort pour nous.
6) Il n’existe pas de construction viable, pas de solution partielle à l’intérieur du système mondial qui rend sans lendemain semblables tentatives réduites à l’échelle de « la tribu ». pas de solution viable pour la seule Algérie, le seul Maroc, la seule Tunisie, voire même les trois les trois réunis, ni pour la seule Lybie ou la seule Egypte. Et cela même si l’action devra être articulée séparément dans chaque pays, avec des fortunes diverses. Se laisser enfermer dans une telle attitude en dépit de nos malheurs et des expériences avortées de ces trente dernières années, est une attitude de pygmées. L’union préalablement à tout le reste mais pas n’importe laquelle devient la condition impérative autour de laquelle il convient de mettre en faisceaux nos énergies, nos intelligences, nos ressources physiques et humaines.
Cela certes, ne se fera pas en un jour et bien des souffrances, bien des déboires accompagneront nos pas. Mais toute autre démarche, toute hésitation qui retarderait notre marche est attentatoire à notre dignité, à notre honneur, à notre droit à la vie.
7) La définition d’un projet de civilisation implique celle des instruments de sa réalisation. Et d’abord celle de l’Etat dont la perversion est apparue très tôt dans notre histoire avec Moawiya.
Quel profil donner à un Etat qui trouverait sa justification dans une authentique Choura ? C’est là un problème majeur qui ne saurait être contourné. Quel contenu donner à cette Choura pour en faire une substance vivante, régissant les actes essentiels de l’Etat, des dirigeants et des dirigés. Comment – et pour employer une expression d’actualité – assurer la transparence des rapports liant les premiers à ces derniers ? De la réponse qui sera donnée à cette question dépendra tout le reste.
A l’évidence, ni le système libéral dominé par l’argent qui pèse d’un poids décisif sur l’opinion et la prise de décision, ni le centralisme démocratique qui se traduit inévitablement en centralisme bureaucratique réduisant l’initiative de l’homme, n’ont répondu à cette exigence.
Seule l’autogestion, la Choura selon notre conception, étendue aux domaines économiques, social, culturel et politique fera des hommes et des femmes les propres artisans de leur histoire. Seule une telle démarche permettra aux masses et d’abord aux jeunes, devenus la véritable classe historique, de faire irruption sur la scène de l’histoire. De la faire comme de la contrôler.
Mais cette Choura est aussi celle des minorités, musulmanes ou non musulmanes. Le projet de civilisation évoqué plus haut devra tenir compte de leurs motivations essentielles. L’accomplissement que véhicule ce projet pour la majorité devra être aussi celui des minorités. Cette question est si importante qu’elle détermine finalement la validité ou la non validité du projet. Toute tentative de renvoyer la solution de cette question à un futur indéterminé – retard que l’on justifierait par les difficultés du moment, fussent – elles graves, voire même très graves – est une erreur lourde de conséquence pour l’avenir.
8 ) Les partis servant un tel projet doivent rompre avec la logique qui a ruiné jusqu’ici nos efforts. Celle qui a fait prévaloir le singulier sur le général, la région sur le pays, le pays sur l’unité des pays, cette unité sur celle de la ouma.
Si nos partis politiques ont en effet échoué, tués par leur étroitesse, leur petitesse, c’est qu’ils portent en eux les perversions des systèmes politiques. Ces mêmes perversions qui nous ont conduits à l’impuissance, à l’échec.
Le divorce intervenu entre les buts poursuivis et la valeur des moyens utilisés a constitué une déviation fatale dans l’action.
La morale évacuée de l’action : voilà le mal qui a affecté l’expérience de l’Occident durant les siècles derniers.
Une remise en ordre des constituants de notre entité passe par la réinsertion de la morale dans nos actes.
9 ) De tout ce qui précède, il résulte que seule une construction autocentrée qui prendrait ses distances avec le système mondial sans pour autant opter pour une autarcie, devient une condition impérative. Une telle démarche aurait pour souci premier d’économiser les potentialités physiques de notre région : le pétrole et le gaz.
Bien utilisés ces derniers représentent une chance réelle pour mener à bien cette construction.
D’autre part, certains choix essentiels sont inéluctables :
A ) la création d’une agriculture assurant en priorité la satisfaction des besoins de la .
Population.
B ) le choix d’ une industrie légère complémentaire de l’ agriculture et assurant une économie intégrée.
C ) une politique très audacieuse en matière de recherche scientifique et dont les orientations déterminant les choix en matière de technologie, tendra essentiellement à servir ces postulats.
Une grande proportion de nos PNB devra lui être consacrée. Le pétrole et le gaz devront non seulement donner les moyens de produire plus de blé, plus de légumes et plus de fruits mais également plus de matière grise.
10) Après bien des avatars, le dialogue Nord- Sud a été enterré à Cancun. Un dialogue Sud-Sud doit désormais lui être substitué grâce aux fonds importants des pays pétroliers arabes et musulmans, massivement entreposés dans les banques occidentales ou investis dans des entreprises commerciales en Occident. Quelques 300 milliards de Dollars contribuent ainsi à consolider un système dont nous-mêmes, et plus généralement le Tiers-Monde sont les principales victimes.
Tout aussi massivement cet argent cet argent devra aller s’investir dans le Sud en offrant des conditions très favorables aux pays bénéficiaires, ceci en conformité avec le respect du principe islamique qui condamne sans appel l’usure.
Cela ne signifie nullement qu’il faille rejeter en bloc tout le Nord. Bien au contraire, car de plus en plus nombreuses sont les voix qui s’élèvent pour l’émergence d’un nouvel ordre mondial. De plus en plus nombreuses également sont les organisations non gouvernementales dont certaines sont déjà opérationnelles sur le terrain, qui militent et agissent pour une nouvelle approche des problèmes de développement, de nouveaux rapports entre le Nord et le Sud, voire même un nouveau projet de civilisation. La crise affecte bien sûr le Sud, parfois tragiquement puisque même des pays comme le Mexique, le Brésil, l’Argentine, la Turquie, le Zaïre, le Pérou, c’est-à-dire parmi les plus riches du Tiers-Monde, sont en cessation de paiement, ce qui est déjà le cas de la moitié des pays du Tiers-Monde et à bref délai sera celui des 5/6ème d’entre eux. Mais des pays comme la Pologne, la Roumanie connaissent le même sort et même dit-on l’opulente R.D.A alors que l’Afrique du Sud pour sa part cherche activement des prêts.
Si la crise affecte gravement le Sud, elle n’en touche pas moins le Nord ; la faillite du fleuron de réussite ouest-Allemend, telefuken en étant la manifestation la plus spectaculaire.
Cette vérité s’impose avec brutalité : la crise est générale et commande des solutions pour tous. Le Nord ne peut sortir seul de la crise et le sauvetage du Nord doit être aussi celui du Sud. Il n’y a pas d’avenir florissant pour ¼ de l’humanité quand les autres ¾ vivent dans la misère et la détresse.
11) Il s’agit pour nous non pas de simples revendications pour réformer nos systèmes mais d’un changement profond, d’un radical changement de cap. Il n’interviendra certes pas brusquement, ni ne se réalisera dans un court laps de temps tant sont grandes les pesanteurs et presque totale notre subordination. La lutte dans cette voie devra s’articuler d’abord autour de quelques objectifs, qui une fois atteints multiplieront les chances de succès :
a) Les accords de Camp David, le plan Fahd, les accords de Fès qui vont à l’encontre des intérêts supérieurs de la Nation Arabe et de la Ouma Islamique devront être combattus sans défaillance et leurs auteurs devront être dénoncés sans relâche.
b) Le blocus sous toutes ses formes de l’Etat d’Israël.
c) Le retour des fonds arabes déposés dans les banques occidentales est une exigence première. Outre que ces fonds trouveraient une utilisation dans le Sud conforme à nos intérêts, il priverait le lobby sioniste d’une abondante source de revenus puisqu’une grande partie de cet argent est déposée dans des banques dont les liens avec le lobby sioniste sont évidents.
d) la rupture des relations diplomatiques avec les pays privilégiant Israël.
e) La création d’une monnaie arabe et islamique.
f) L’aide inconditionnelle et sous des formes multiples à tous les mouvements de libération dans le monde. L’Erythrée, l’Afghanistan, les Philippines, le Guatemala, le Salvador situent certains des théâtres essentiels où devra s’investir cette aide. Une attention particulière devra d’autre part être accordée à la lutte des Amérindiens pour la défense de leurs droits et de leur dignité.
g) L’émigration des Arabes et des musulmans en Occident est, pour des raisons différentes et cumulatives, devenue massive et souvent de qualité. En l’organisant et en la sensibilisant pour la réalisation des objectifs que nous venons d’énumérer, elle peut devenir une force non négligeable, et contribuer par ailleurs en multipliant les forums de discussion, les séminaires, à la clarification de ces problèmes.
Devant l’ampleur de la tâche qui nous attend, une constatation s’impose : la majorité des équipes dirigeantes actuelles sont incapables et le plus souvent hostiles à la réalisation de ces projets.
Des changements profonds dans notre panorama politique sont de ce fait absolument indispensables. Ils préluderont à la venue de nouvelles et jeunes équipes dirigeantes, irriguées d’un sang nouveau, plus compétentes et plus décidées.
13) L’ère des coups d’Etats militaires coupés de leurs peuples ou même dans le cas où cette coupure n’est pas totale prenant vite leurs distances avec les peuples – est révolue.
Ces changements qui détermineront notre avenir sont d’abord et surtout l’affaire des peuples, des masses populaires. Elles seules peuvent mettre en marche l’irrésistible élan, la vague de fond qui balayera la multitude de régimes corrompus, asservis, qui perpétuent l’impuissance, l’indignité, voire la trahison, qui constituent une insulte à notre histoire, à nos valeurs, à notre devenir, à notre droit à la vie.
Tel est le sens profond du 1er Novembre, d’un autre 1er Novembre qui perpétuerait un message et laisserait une empreinte claire et durable sur les choses et les êtres pour l’honneur des hommes et la gloire de Dieu.
AHMED BEN BELLA, 1er novembre 1982